Par le Dr Oliver Tearle

A. E. Housman (1859-1936) était l’un des plus grands classicistes de son âge, et était également, après le succès de son premier volume de poèmes (auto-publié) , Un garçon du Shropshire (1896), un poète extrêmement populaire.

Comme Thomas Hardy, la majorité de ses poèmes sont écrits dans un style si simple et direct qu’une analyse plus poussée ou une interprétation critique peuvent sembler inutiles; mais, comme toujours, il convient d’examiner comment Housman crée le coup de poing émotionnel que porte son poème.

Le quarantième poème d’Un garçon du Shropshire, qui commence « Dans mon cœur un air qui tue », est l’un de ses poèmes les plus célèbres, un court texte sur la nostalgie et le vieillissement.

Dans mon cœur un air qui tue
De yon far country souffle:
Quelles sont ces collines bleues dont on se souvient,
Quelles flèches, quelles fermes sont-elles?

C’est le pays du contenu perdu,
Je le vois briller,
Les autoroutes heureuses où je suis allé
Et je ne peux pas revenir.

Le poème peut être résumé en quelques phrases brèves. L’orateur regarde une terre lointaine et se souvient, avec une certaine nostalgie mélancolique, des collines et des flèches de sa patrie. Il reconnaît que, même s’il était heureux quand il vivait là-bas, il ne peut pas y retourner maintenant qu’il est plus âgé et qu’il a laissé cette terre derrière lui.

La forme traditionnelle du quatrain du poème, avec le schéma de rimes abab, est utilisée dans de nombreux poèmes de Housman, et ici la forme le sert bien, lui permettant de réfléchir sur le temps qui passe (et la futilité de la nostalgie d’une terre et d’un âge morts et disparus) dans des strophes tendues et régulièrement rythmées:

Dans mon cœur un air qui tue
De yon far country souffle:
Quelles sont ces blue remembered hills,
Quelles flèches, quelles fermes sont-elles?

Pourtant, il y a une certaine subtilité dans les choix de mots: cet « air qui tue », par exemple, est le vent soufflant une mauvaise tension mélancolique dans le cœur même de l’orateur, comme une sorte de paludisme de l’esprit; mais il porte aussi, compte tenu du poids émotionnel de ce « cœur », des connotations d’airs musicaux, d’airs obsédants et de cadences sombres.

Notez également  A E Housman Shropshire Lad hills que « blue remembered hills » n’est pas un trait d’union, Housman signifie donc que les collines sont littéralement bleues (inhabituelles, mais peut-être pas impossibles étant donné l’apparence des collines) ou devrions-nous analyser « blue » comme désignant une nostalgie mélancolique?

L’absence de trait d’union introduit un certain doute: « collines bleutées » suggérerait que le locuteur se souvient de sa jeunesse et de son enfance avec une teinte de tristesse « bleue », mais sans le bénéfice du trait d’union pour nous guider, nous ne pouvons pas en être entièrement sûrs.

L’utilisation de l’allitération dans la deuxième strophe – « terre de contenu perdu », « autoroutes heureuses », « ne peut pas venir » – fait astucieusement écho à cette nostalgie, alors que les sons aspirés de « autoroutes heureuses », reflétant les vaines aspirations du locuteur à retrouver le passé, cèdent la place au son dur de « ne peut pas venir ».

C’est le pays du contenu perdu,
Je le vois briller,
Les autoroutes heureuses où je suis allé
Et je ne peux pas revenir.

En effet, l’allitération de « ne peut pas venir » sonne avec des « autoroutes heureuses », mais implique une déviation surprise de ce qui est attendu: Housman écrit « ne peut pas venir » plutôt que « ne peut pas aller », pourtant il avait écrit « C’est le pays du contenu perdu », pas « Ceci ».

Bien qu’il regarde au loin le passé teinté de rose, il se dégage dans ce mot simple et surprenant « viens » non seulement un rappel du fait que le passé ne peut pas revenir, mais aussi un désir mélancolique qu’il soit peut-être de retour parmi ces autoroutes heureuses.

Il ne peut pas tout à fait faire face au fait qu’il est toujours destiné à regarder de loin le pays du contenu perdu, et cette incapacité à admettre toute la vérité franche de la question est doucement et subtilement encodée dans le choix du « come » plutôt que du « go ».

Un poème obsédant, ceci, dès sa première ligne. « Dans mon cœur un air qui tue »: c’est aussi la surprise de ce mot dur « tue », ainsi que le quasi-paradoxe de celui-ci (l’air est généralement considéré comme donnant la vie plutôt que de nous infliger la mort, bien que cela dépende certes du type d’air que l’on choisit de respirer).

Vous pouvez analyser des aspects de ce poème pour toujours et vous en sortez encore en vous interrogeant sur la beauté simple des lignes, la façon dont Housman nous présente la nostalgie dans deux quatrains presque parfaits.

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L’auteur de cet article, le Dr Oliver Tearle, est critique littéraire et professeur d’anglais à l’Université de Loughborough. Il est l’auteur, entre autres, de The Secret Library: A Book-Lovers’ Journey Through Curiosities of History and The Great War, The Waste Land and the Modernist Long Poem.

Image: Vue ouest sur les collines du Shropshire (crédit photo: Mat Fascione), via Geograph.org.uk .

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